Notre Terre !

Ça y est... on l'a fait !

Après trois années de recherches, au gré de nos explorations et tergiversations, un petit coin du Québec s'est imposé à nous.
Me voilà propriétaire d'un bout de la Terre, en Mauricie dans la Maskinongé. Autrefois appelée Hunstertown (la ville des chasseurs), cette petite bourgade est aujourd'hui rattachée à Saint-Paulin.

En tant que migrante-nomade, cela fait déjà 15 années que je vogue d'un continent à l'autre, d'un territoire à l'autre, d'une culture à l'autre, le coeur et le corps tiraillés, sans parvenir à enfoncer mes racines sur une terre d'appartenance, sans savoir où poser mes valises et mes armes.

Ce 1er janvier, j'avais pris deux résolutions: arrêter (une fois encore) la cigarette et lâcher prise (une fois de plus). 

Le lâcher-prise concernait la terre: mon bout de terrain devrait s'imposer avec la force de l'évidence, sans forcer les choses.

C'est ainsi que le dernier mégot s'est écrasé le 1er février et que l'offre d'achat a été acceptée le 9 février. Il doit y avoir un lien ésotérique que je ne vois pas encore...

Et depuis quatre semaines,... je pleure... de joie et d'émotion. 

Je pleuris, comme dirait Nathaniel.

Parce que cette terre m'offre 

un chez-nous quelque part. 

Cette fois c'est vrai, le Québec m'attrape... me rattrape et me retient. 

Le Québec décide de me faire sien et me demande de lui appartenir.

Intérieurement c'est réellement bouleversant, comme une forme de réponse à un besoin de reconnaissance. Oui, une Re-Co-Naissance. J'imagine que ce sentiment doit être partagé par la plupart des immigrants, où qu'ils soient.

Et en même temps, cette terre signe un point de non-retour. L'Europe et mes racines originelles ne devront sans doute plus être envisagées comme une alternative d'avenir pour moi. Ce deuil sera à faire.

Me voilà confrontée à un double mélange d'émotions qui agite actuellement mon âme.

Pour les gens de Saint-Paulin,  il y aura dorénavant la "Française" et son fils. Pour l'Immigrante, Saint-Paulin sera une invitation à explorer la permanence des éléments, un repère à construire. Pour cela je ne remercierais jamais assez Antoine et Jean-Français qui m'ont offert ce bout de leur terre à bois.

Et puis aussi, surtout, sur mon bout de la Terre, il y a un petit ruisseau, un marais avec canards, hérons et ouaouarons, de grands arbres, une rivière baignable et canotable, une petite montagne, une belle vue, des voisins charmants et des érablières-cabane-à-sucre en arrière. Tout ce que j'aime, ici réunis. Je suis très chanceuse.

Tout ça, "juste pour moi" ? C'est en fait très symbolique, mais quelle portée dans mon parcours de migrante-immigrante-souvent-fauchée.

Et me voilà déjà en train de rêver d'y rebâtir une vieille maison ancestrale abandonnée et dénichée quelque part le long du St-Laurent. Une vraie petite vieille, pièce sur pièce, équarrie à la hache, avec ses murs croches, son plafond trop bas, ses poutres qui craquent et son toit qui chante. Une de celles qui a vu et entendu "L'ancêtre (qui) calle un set carré, suivi du Canadien errant, une vieille chanson à répondre ou une romance western." (extrait d'un merveilleux texte de mon ami et mentor Frans Van Dun, paru dans Le Jumelé).

À moins que je ne décide de bâtir une cabane en bois rond, comme un voyage initiatique qui me ferait revivre le début de la colonie, celle "des grandes familles de jadis (qui) traversaient les tempêtes de la vie, s'élevant d'année en année à la force du poignet, animées d'une énergie increvable, celle des défricheurs, des bûcherons et des mineurs" (Frans Van Dun).

 

Un de nos bonheurs ? Aller chercher neige et glace pour les faire fondre sur le poêle à bois. Arrêter le temps. Permettre à nos mains de redécouvrir quelques gestes simples et essentiels. Vous y recevoir et partager tout cela ! Ce n'est qu'à une centaine de km de Montréal... 1h30 de route tout au plus... vous viendrez y faire votre tour n'est-ce pas ?

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